dimanche 7 avril 2024

La BBC Master 128, Rolls Royce du 8bit ! Partie #2


C'est partit pour l'aventure !


Je ne connaissais absolument pas la machine. Je n'en avais jamais approché, et même si j'ai fait le portage de l'émulateur BBC Micro pour Recalbox, j'étais très loin de maitriser tous les arcanes des BBC Micro.

Mais ce passage par l'émulateur m'a appris une chose. Ces machines sont très riches et complexes. Alors, je vais suivre la consigne pour une fois, et RTFM !

La machine est pourvue d'une extension "DataCentre" de RetroClinic, un passionné de ces machines qui a conçu beaucoup de cartes pour améliorer les BBC ou émuler d'anciennes extensions introuvables aujourd'hui (comme les TUBEs)

Avec la machine, j'ai reçu le manuel d'utilisation, ainsi que celui du DataCentre. Les deux sont en parfait état !

La documentation de la machine regorge d'informations. Mais vous vous doutez bien que, heureux comme un gosse qui vient d'ouvrir un cadeau de Noël, je me suis empressé d'aller m'amuser sur le clavier plutôt que de tout lire d'un coup !


Outre les instructions BASIC et les commandes de l'OS, on y trouve aussi des informations sur les connecteurs de l'appareil, ce qui m'a permis de refaire un câble RGB qui embarque le son.
J'y reviendrai plus tard 😉




Les commandes rom-agnostic


En dehors du BASIC lui-même, ou de tout autre langage installé, les BBC ont un système de commande indépendant de la ROM qu'on a lancée. Je suppose, que c'est l'OS qui en gère la majorité.

Quel que soit l'interpréteur dans lequel on se trouve, on peut utiliser les commandes système en les précédents d'un astérisque :   *CONFIGURE*RAM*TAPE…
Et il y en a beaucoup... vraiment beaucoup !

Mon plus gros souci, a été de comprendre comment on manipule les différents périphériques.

En lisant le manuel de RetroClinic, j'ai appris rapidement à lire le contenu de ma clef USB et à monter les images disques dans des lecteurs virtuels. 

Mais je ne savais toujours comment accéder au disque dur (sur Compact Flash) IDE.

Il m'a fallu un moment, et pas mal d'expérimentations pour comprendre les différents resets et les "filing systems"

Les Filing Systems


C'est en réalité la clef de voute des BBC. En français, on peut le traduire par "Systèmes d'archivages". Ramené à un ordinateur, ça signifie simplement, les différents supports de stockage.

À la différence qu'ici, tout est filing system ! Même les cartouches. Le BBC Master dispose de 2 ports cartouches, et y accéder, requiert l'utilisation du filing system ROM.

On bascule d'un FS à un autre avec les commandes :
  • *TAPE : Lecteur K7
  • *DFS : Lecteur disquette
  • *ADFS : Disque dur, c'est lui qui me permet d'accéder à la Compact Flash en IDE.
  • *ROM : Cartouche (curious isn't it? 😅)
  • *NET : EcoNet, le nano-reseau made in Acorn
  • *RAM : Celui-là c'est le DataCentre. 1Mo de RAM, permettant d'émuler 4 lecteurs de disquettes virtuels, et même un cinquième, résident.
Chaque FS peut être configuré en auto-boot ou pas. Je n'ai pas de lecteur de K7 pour l'instant, mais ce sera amusant à tester avec 😁

Tous ces FS sont gérés par différentes ROMS, dont je peux avoir la liste avec la commande *ROMS.

Je dois dire que pour une conception de 1980/81, je suis réellement impressionné...
Milles et une façon de faire reset...

J'ai mis un moment également à comprendre les différents RESET.
Sur cette machine, la touche break fait un soft-reset. Mais combinée avec d'autres touches, ça change tout :
  • BREAK : Soft reset. Si le dernier FS était configuré en Auto-boot, il démarre. Idem à l'allumage à froid d'ailleurs.
  • CTRL+BREAK: Hard reset.
  • SHIFT+BREAK: Soft+reset + auto-boot du dernier FS sélectionné.
Une fois qu'on maitrise, on peut commencer à faire des choses amusantes

Donc, un petit coup *ADFS suivit d'un *CONFIGURE BOOT et la touche BREAK fera booter mon disque dur. Je peux aussi me passer du *CONFIGURE et faire un SHIFT+BREAK. Mais le *CONFIGURE m'assurera que le disque bootera au prochain allumage !

Un disque dur IDE, sur un 8bit... Rendez-vous compte !

J'ai appris aussi que la touche R pendant un BREAK ou un SHIFT-BREAK, permet de basculer sur le FS RAM du DataCentre. Pratique pour booter un jeu monté dans un lecteur virtuel, d'ou qu'on soit.

Mais j'ai aussi appris à mes dépens que la touche R à l'allumage de la machine fait un reset CMOS ! Comme un BIOS de PC 😅

En voyant ça à la place du BASIC, vous imaginez bien ce que j'ai pu me dire: "Oooooh shit !"

Heureusement, dans le manuel on trouve tout ce qu'il faut pour tout reconfigurer avec la commande *CONFIGURE

On peut aussi passer par l'application de configuration, disponible d'ailleurs dans le menu qui se charge lorsqu'on boote le disque dur.

Bien sûr, tout est détaillé dans le manuel, parce que certains pictos sont loin d'être évidents !


Et les jeux ?!


Les jeux, il y en a eu beaucoup sur cette machine. Même si c'est une machine Britano-britannique, la ludothèque est riche.

On peut monter un GOTEK bien entendu, ce qui devrait assurer une compatibilité à toute épreuve des jeux.


Mais avec DataCentre, je peux quand même monter une image disque dans un lecteur virtuel facilement.
Un coup de *RAM et de *CAT 5 pour lister ce que j'ai sur la clef USB, puis un *IMPORT PRINCE~1.SSD pour monter Prince of Persia dans le drive virtuel #0.

Il me restera à faire un SHIFT+BREAK pour lancer le jeu 😁

Mais en fait... ça ne fonctionne pas. Certains jeux accèdent aux DFS directement et ne fonctionnent pas en drive virtuel.
Mais pas de panique, RetroClinic avait tout prévu ! Un petit coup de commande *DTRAP, et les commandes DFS sont déroutées vers DataCentre ! Et hop, la magie opère une nouvelle fois !



Je pense avoir fait un petit tour rapide de cette machine vraiment impressionnante.
Il me reste encore tant à découvrir, qu'il est possible que je fasse une partie 3 plus tard.

Si vous avez l'occasion d'en trouver un, ou même un BBC micro, foncez !

Pour ma part, il est possible que je me procure d'autres joujoux de chez RetroClinic, comme leur émulateur TUBE à base de Raspberry Pi, capable d'émuler tous les processeurs TUBEs des années 80, ou même d'utiliser l'ARM du Pi nativement !

Mais... y a-t-il au moins des défauts sur ces machines ?


Oui, il y en a, comme partout.

Le premier m'a amené à refaire un câble RGB, que je n'ai pas encore testé au moment où j'écris ces lignes 😅 Il s'agit du SON !


Non non, il n'est nullement question de la qualité du son de la machine, qui pour une conception de 80 est plus qu'honorable avec ces 4 canaux.

Il s'agit d'un problème physique, qui agace nombre de possesseurs de la machine. Le son sort par un haut-parleur intégré à la machine, sans aucune solution pour régler le volume sonore ! Il est au maximum tout le temps.


On peut modifier le boitier en ajoutant un potentiomètre qu'on ira connecter au pied du HP, mais il existe une solution plus efficace :
Refaire un câble RGB en piquant le son sur la sortie arrière de la machine et débrancher le HP interne. Hop, je peux maintenant régler le volume sur la TV 😁


Le second est plus problématique. Il s'agit de la palette fixe de 8 couleurs du chip graphique choisi par Acorn.

C'est très limité. En réalité, il y a 16 couleurs. 8 couleurs primaires, et 8 couleurs clignotantes. Mais ça ne change rien au fait que c'est très limité.

Acorn n'a pas vraiment mis l'accent sur les jeux. Le chip graphique est capable de monter haut en résolution pour l'époque, mais dispose d'un jeu de couleur faible et ne permet aucune accélération matérielle pour les sprites, scrollings, etc.

La puissance brute de la machine compense un peu ces absences, mais les couleurs restent le principal défaut "visible" des Acorn.

Malgré tout, les graphistes ont redoublé d'astuce pour produire des jeux de qualité, comme le montre les screenshots ci-dessous :



Et Acorn dans le reste du monde ?



Malheureusement pour nous, les Acorn se sont très peu exporté en dehors du Royaume Britannique.

Il y a plusieurs raisons à ça.

Tout d'abord, le manque de stratégie commerciale/marketing. Acorn est une boite ultra-pointue en terme technique, mais on a beau avoir le meilleur produit du monde, si on ne sait pas le vendre, on ira moins loin que d'autres qui ont des produits plus médiocres, mais qui savent les vendre !
La BBC a permis à Acorn de se faire une place de choix en Angleterre. Sans eux, nul doute que l'aventure se serait arrêtée plus tôt.

Ensuite, il y a le prix. Car proposer des machines aussi pointues, aussi extensibles, et avec des RAM qu'un seul constructeur est capable de produire, va faire grimper sérieusement la facture !
On est entre 300£ et 400£ à l'époque. Ramenés en Euros actuels, ça donne une machine à 2000€. Pas à portée de toutes les bourses...

Enfin, et c'est pour nous, joueurs retros, le point le plus négatif des machines Acorn: Les 8 couleurs fixes !
Hors du marché Britannique, la machine se retrouve en concurrence frontale avec les Atari, les Commodore et beaucoup d'autres, qui affichent fièrement des jeux aux couleurs bien plus riches ! 

 Hermann Hauser et Chris Curry, fondateurs d'Acorn, à Cambridge

Voilà pourquoi, ces machines aux capacités formidables, sont restées cloisonnées au seul marché Anglais.



La BBC Master 128, Rolls Royce du 8bit ! Partie #1

Pour une fois il ne s'agit pas de restauration, mais plutôt de découvrir une machine peu connue et difficile à trouver dans nos contrées : Le BBC Master 128 d'Acorn.

Et si je peux vous la présenter aujourd'hui, c'est grâce à un très généreux donateur que je remercie encore chaleureusement.


Un peu d'histoire...


Le nom "Acorn" ne vous dit peut-être rien, mais vous utilisez pourtant leurs produits tous les jours. Du moins, les descendants en ligne directe.

Acorn est une entreprise britannique fondée en 1978.

En 1979, elle lance son premier micro-ordinateur : l'Atom, à base de 6502, le CPU qui équipe également les Commodores 8bits, les Ataris 8bits et les Apple II.

Avec ses 2ko de RAM et ses résolutions allant jusqu'à 256 pixels en largeur, la machine ne dénote pas pour l'époque, et rencontrera un certain succès.


Le BBC Micro


Mais c'est en 1981 qu'Acorn montera sur la première marche du Podium. En effet, la société a remporté un appel d'offre émis par la BBC, qui cherche un ordinateur pour son émission Computer Literacy, une émission destinée à l'apprentissage de l'informatique.

Naitra alors, le BBC Micro, une machine hors norme sur bien des points.

Rappelez-vous, nous sommes en 1981. À ce moment-là, le parc informatique classique se compose d'Apple II, d'Atari 800, de Sinclair ZX-81, de TI99/4A ou encore de Commodore Vic-20. Toutes ces machines sans exception, même l'Apple II, font office de hochet pour enfants à côté du BBC Micro !





Et pour cause :

  • Les BBC Micro sont équipés d'un 6502 cadencé à 2 MHz, son maximum. Acorn a choisi le même design qu'Apple ou Commodore pour permettre les accès concomitant à la RAM à partir du CPU et du Chip graphique. Il lui faudra des RAM à 4 MHz, une gageure pour l'époque ! Seul Hitachi sera capable d'en fournir.
  • la machine affiche déjà 16 ko de RAM pour le modèle le plus bas, 32 pour le modèle B. Plus tard, ils monteront à 64 puis 128 ko.
  • 16 slots de ROM sont prévus : 4 sur la carte mère, les autres par extensions. Ce qui permet à l'ordinateur de proposer plusieurs langages, logiciels ou [D]OS. En 1981, c'est juste incroyable.
  • D'origine, il propose une sortie vidéo RF, du composite et du RGB. Il y en a pour tous les gouts et tous les téléviseurs ! 
  • Du côté des périphériques, c'est l'euphorie, avec un lecteur K7, des lecteurs disquettes, des disques durs, des extensions ROMS, des extensions RAM, des joysticks, et bien d'autres choses encore... Jugez vous-même avec les photos juste en dessous !



Cette machine a 4 ans d'avance au bas mot. Et ce n'est pas tout...

Vous avez dit TUBE ?


Le BBC Micro peut recevoir une extension TUBE, qui n'est rien d'autre qu'un second CPU capable de prendre en charge la gestion des périphériques et de décharger complètement le CPU principal de cette tâche !
Prévu à la base pour recevoir un Z80, de multiples extensions TUBE verront le jour avec des Z80, des 6502, des 32016 (6 MHz) ainsi que... des ARM !

Oui oui... des ARM.





Acorn, papa des ARM


Et oui, l'ARM a été mis au point par Acorn, dans la même période. D'ailleurs, les versions 2 et 3 équiperont plus tard les Archimèdes, concurrents malheureux des Atari ST et Amiga.

ARM signifie à la base Acorn RISC Machine.

En 1990, la division processeur d'Acorn se détache de la maison mère et deviendra ARM Ltd. et ARM se renommera Advanced RISC Machine.

Les processeurs et micro-contrôleurs qui équipent vos Téléphones, vos TV, vos Box et même les programmateurs de vos machines à laver sont tous des descendants des ARM d'Acorn.




Mais revenons à nos moutons...

Le BBC Master


Le BBC micro évoluera au fil des ans. Des modèles B, B+, 64 et 128 ko verront le jour.

Jusqu'en 1986 ou nait le BBC Master 128, évolution ultime de la série des BBC Micro.
Lui-même sera dérivé en plusieurs modèles, certains avec jusqu'à 512ko de RAM, d'autres avec la carte EcoNet intégrée (équivalent survitaminé du nanoréseau de Thomson), ou encore une version Turbo avec un CPU à 4 MHz !

De base, il est équipé d'un BASIC, des roms pour gérer disquettes et disques dur, et surtout, bien moins courant, d'un Éditeur de Texte, d'un Traitement de texte et d'un Tableur !
Seul le TO9 de Thomson propose à peu près la même chose.


Voilà pour la petite page d'histoire et de présentation de cette série de machines uniques au monde.
Revenons maintenant à la petite merveille qui m'a été généreusement offerte 😃

A la découverte du BBC Master 128



Quand je l'ai reçu, il était tellement bien protégé, que j'ai du mettre pas loin de 10 mn à sortir la machine de son cocon de polystyrène, de scotch et de mousse ! 😂

Le vendeur est un connaisseur, et on voit tout le soin qu'il a apporté à s'assurer que sa machine arrive en bon état.

Pourtant, à sa mise en route, quelle ne fut pas ma déception de ne rien voir apparaitre à l'écran, la machine s'obstinant à cracher un *BEEEEEEUP* fort et continu 😨

Je me suis dit que peut-être, avec les vibrations du transport et malgré l'emballage, quelque chose avait peut-être bougé à l'intérieur.

Ni une ni deux, j'ai ouvert la machine.

On dit souvent "Deutsche Qualität" pour désigner la qualité, en référence à une célèbre publicité, mais je peux vous garantir que les anglais ne rigolaient pas à cette époque, quand on voit la taille des vis qui ferment le boitier !

Comme je m'en doutais, la petite carte avec les ROMs de l'OS sur support PLCC à droite, étaient à moitié sorties de leur logement...



Après avoir enfiché fermement la petite carte, je remets le capot supérieur sur la machine et je tente un rallumage.

*BEUP*, suivit d'un court silence, suivit d'un *BIP* plus enjoué, et la magie opère ! 😍

Me voilà donc avec un BBC Master 128 fonctionnel !

La suite, au prochain épisode !


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